Le pouvoir de la monnaie, transformons la monnaie pour transformer la société, de Jézabel Couppey-Soubeyran, Pierre Delandre et Augustin Sersiron

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Le pouvoir de la monnaie en bref

Nous avons eu la chance d’assister à la rencontre avec Jézabel Couppey-Soubeyran, Pierre Delandre et Augustin Sersiron à la Librairie l’Instant qui nous ont présenté en près de 2 heures les idées développées dans leur ouvrage.

Après cet échange très riche, le nombre de pages (près de 400 !) ne nous a pas dissuadé de faire l’acquisition du livre.

Les auteurs commencent par y rappeler la nature de la monnaie.
La monnaie a une double dimension : une dimension collective à travers le lien de confiance qui nous lie les uns aux autres dans l’échange et une dimension individuelle par le moyen qu’elle confère à chacun.
La monnaie est ainsi une institution au fondement de l’ordre social qui constitue une force de transformation sociétale.

Les auteurs retracent ensuite l’histoire de la monnaie :

  • les communautés tribales,
  • les sociétés palatiales ou domaniales qui ont inventé la valeur marchande et la monnaie de compte,
  • les sociétés impériales qui ont développé les premières monnaies frappées,
  • les sociétés féodales marquées par une dissociation des monnaies de compte et de paiement,
  • les sociétés coloniales qui ont culminé avec l’étalon or,
  • les sociétés capitalistes marquées par le développement des monnaies bancaires dont l’émission est encastrée dans le marché de la dette au sens où elle est issue du crédit que les banques octroient.

Ce rappel historique illustre le fait que la monnaie n’est pas une réalité intemporelle, immuable.
La monnaie est une construction historique et sociale malléable. Elle reflète l’organisation de la société et de l’économie, les formes du pouvoir politique ainsi que les valeurs culturelles. Elle est ainsi portée par une volonté politique qui vise à organiser la société selon les objectifs et les valeurs du moment.
Le mode d’émission bancaire qui prévaut aujourd’hui n’existe que depuis 200 ans. La monnaie bancaire a elle-même connu des transformations en accompagnant le capitalisme marchand, le capitalisme industriel puis le capitalisme financier.

Les auteurs décrivent alors le fonctionnement actuel de la monnaie.
La monnaie est aujourd’hui créée pour répondre à un besoin économique, par un jeu d’écriture comptable, lorsque les banques accordent un crédit à un ménage ou à une entreprise, en fonction notamment de sa confiance dans l’avenir. Le mode d’émission de la monnaie est donc actuellement de nature bancaire et orienté vers le financement d’activités rentables. Au mode traditionnel d’émission de monnaie par le crédit s’est ajouté un mode acquisitif de création de monnaie par l’achat de titres. Le mode d’émission de la monnaie s’est en effet financiarisé, la création bancaire prenant sa source non seulement dans le crédit mais aussi dans les titres.

Dans un second temps, les auteurs montrent l’intérêt de compléter le système monétaire actuel pour prendre en compte les dimensions de l’humain et de l’environnement.
La monnaie bancaire n’est en effet pas adaptée aux secteurs non marchands ou non suffisamment rentables. Elle peut être complétée par des subventions mais il est difficilement concevable de mettre à contribution le budget de l’Etat compte tenu du niveau d’endettement actuel. Les auteurs envisagent alors un nouveau mode d’émission permettant de financer des dépenses écologiques et sociales indispensables pour faire face aux défis actuels. L’Institut d’émission émettrait de la monnaie légale à destination d’une Caisse de développement durable pour l’affecter à des investissements socialement et écologiquement indispensables mais financièrement non rentables. Ce mode volontaire d’émission monétaire serait réservé aux subventions d’actions favorables à l’environnement et à une vie quotidienne plus qualitative.
Pour les auteurs, l’émission de cette monnaie « volontaire » constitue une première étape du passage à une société plus respectueuse de la justice sociale et des limites environnementales.

Pour en savoir plus :

Le mot de l’éditeur

On ne changera pas la société en changeant seulement la monnaie, mais on ne la changera pas non plus sans changer la monnaie : tout grand changement sociétal va de pair avec un changement monétaire. La bifurcation écologique et sociale devra donc s’appuyer sur une bifurcation monétaire, adaptant la monnaie aux défis de notre temps pour mobiliser sa puissance de transformation.

Quelques mots sur les auteurs

Jézabel Couppey-Soubeyran est maîtresse de conférences à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et professeure associée à l’Ecole d’économie de Paris. Elle rejoint en 2020 l’Institut Veblen comme conseillère scientifique pour les réformes économiques.
Pierre Delandre est sociologue de la monnaie, certifié en finances publiques, cadre dans la haute fonction publique au sein d’une banque centrale de l’Eurosystème et chercheur chez Etopia.
Augustin Sersiron, diplômé de l’ESSEC, est docteur en sciences économiques et en philosophie politique à l’Institut Catholique de Paris.

Notre avis

Les 3 auteurs adoptent une approche pluridisciplinaire de façon pédagogique pour exposer leur proposition d’évolution du mode d’émission de la monnaie afin de financer un projet de société plaçant les enjeux sociaux et écologiques avant ceux de la croissance économique.
Dans cet ouvrage complet, nous prenons conscience que la monnaie est éminemment politique, compte tenu de sa puissance de transformation de l’ordre social. Il en résulte que si nous souhaitons une transformation profonde de la société, cela doit passer par un changement de la monnaie.

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