Pour sa 6ème édition, Paris Face Cachée a proposé pendant 3 jours des rendez-vous originaux dans une centaine de lieux atypiques ou confidentiels qui sont tenus secrets jusqu’à l’événement.
Cette année, deux types d’aventures sont proposés :
- Osez l’interdit : Des lieux habituellement fermés au public, exceptionnellement ouverts.
- Risquez l’inconnu : Des aventures uniques imaginées sur mesure dans des lieux habituellement ouverts au public..
Nous nous sommes inscrits à l’aventure « De bronze et de bois ». Rendez-vous à l’intersection de 2 rues dans le 14ème arrondissement avant de nous rendre à la Villa Seurat.
La Villa Seurat regroupe plusieurs ateliers ou hôtels particuliers construits de 1924 à 1926 pour différents artistes. Elle s’ouvre une impasse bordée de maisons construites, pour huit d’entre elles, par André Lurçat.
Salvador Dali a vécu au 101 bis, rue de la Tombe-Issoire à l’angle de la villa Seurat. Aux n° 3 et 3bis, se trouvaient les ateliers des peintres Marcel Gromaire et Édouard Goerg, au n° 4, la maison de Jean Lurçat, au n° 7bis, au n° 9 et 11, les ateliers de Madame Bertrand et du sculpteur suisse Arnold Huggler. Au n° 18, vécurent entre autres Henry Miller, Anais Nin et Soutine.
Au n° 7 bis se trouve la maison-atelier de la sculpteur Chana Orloff (1888-1968), construite par l’architecte Auguste Perret, l’un des pères du Modernisme architectural français, en 1926.
Née en 1888, en Ukraine, huitième enfant sur neuf, elle va fuir avec sa famille pour la Palestine suite aux pogroms de 1905. Elle se destine à l’origine à être tailleur couturière. Elle va à Paris pour perfectionner sa technique. Comme elle dessine très bien, on lui conseille de changer de voie. Elle va en 1911 à l’école des arts décoratifs (la « petite école » où ont également allés des artistes comme Rodin et Maillol) où elle suit des cours de dessins et mathématiques.
Nous commençons notre visite par l’atelier d’exposition. Les œuvres qui s’y trouvent permettent d’illustrer sa vie et l’évolution de sa carrière artistique.
Au début, faute d’argent comme la plupart des artistes, elle réalise des œuvres en bois et en plâtre. Ensuite, elle essaie souvent de faire une version en bronze de ses œuvres car on faire plusieurs exemplaires. Le fondeur avec qui elle travaillait à d’ailleurs conservé les moules, ce qui a permis de reproduire certaines de ses œuvres saccagées pendant la guerre.
En 1914, elle expose au salon d’automne. Elle rencontre de nombreux artistes dans des brasseries du quartier Montparnasse qui font partie de l’académie Vassilief.
En 1919, après le décès de son mari, elle se retrouve seule avec son fils. Elle se recentre sur son fils et sur son œuvre. Plusieurs œuvres témoignent de l’importance de la maternité.
Source : WikipediaElle réalise près de 500 portraits (sculptures, dessins, bois gravé) qui lui permettent de se créer un réseau. Ces portraits représentent les personnes de son entourage ainsi que de nombreux artistes et personnalités comme Auguste Perret, l’architecte de cette maison atelier.
Dans l’entrée, nous pouvons apercevoir une série de portrait sur bois gravés, réalisés sur du bois couchés et qui est plus tendre.
La guerre a conduit à l’évolution de son œuvre vers une féminité plus marquée.
Chana Orloff est reconnue par ses pairs et obtient en 1925 la nationalité française et la légion d’honneur. En 1926, elle est désignée comme membre du jury du salon d’automne. Cette même année, elle commande sa maison atelier à Auguste Perret. La maison était à l’origine scindée en deux : l’atelier d’exposition et l’atelier de création dont l’accès était restreint. En haut de la mezzanine se trouvait l’espace d’habitation.
Dans les années 30, Chana Orloff essaie d’exposer à l’étranger. Elle représente la menace de la guerre par des métaphores animales, notamment la sauterelle. En 1937, les nazis avait fait une exposition d’œuvres d’artistes considérées comme dégénérées auxquels elles est rattachée.
En 1940, elle veut fuir l’occupation en allant à Royan. Mais il est déjà trop tard. Elle retourne alors à Paris. Après avoir été informé à temps, elle fuit en 1942 en Suisse avant la rafle du Vel d’hiv. Elle revient dans son atelier saccagé par les Allemands en 1945.
Nous montons ensuite sur le mezzanine pour poursuivre la découverte de ses œuvres. Certaines de ses œuvres illustre l’influence du cubisme.
Pendant la guerre, elle réalise des « sculptures de poche ».
Nous poursuivons notre visite dans l’atelier création.
Après la guerre, plusieurs artistes se sont interrogés sur l’évolution de l’art, certains se tournant vers la voie de l’abstraction. Ce n’est pas le cas de Chana Orloff qui a toutefois modifié son style avec la réalisation d’œuvres qui ne sont plus polies. Mais la cohérence est conservée avec la représentation de la maternité et de la féminité.
En 1948, elle est grand-mère et c’est la naissance officielle d’Israël. Elle partage la seconde partie de sa vie entre Paris et Israël. Sa dernière œuvre connue montre la vitalité de sa créativité.
A la fin de notre visite, nous pouvons échanger avec la petite fille de Chana Orloff qui nous raconte des anecdotes et la relation fusionnelle entre son père et sa grand-mère.
En pratique
Aujourd’hui, inscrite monument historique, cette maison atelier se visite sur rendez-vous.
7 bis Villa Seurat
75014 Paris